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Appartient au dossier : Couleurs à l’œuvre dans la littérature et les arts

Couleurs, mots, textes

Les relations que les écrits littéraires entretiennent avec la couleur sont de natures diverses. Le lien le plus immédiat passe par le regard qu’un écrivain porte sur un tableau ou un artiste. Mais les noms de couleur, les mots de la couleur, dans leur infinie variété et leur poésie sont aussi déclencheur de la création littéraire. Les écrivains ont parfois recours à la couleur dans sa matérialité la plus élémentaire, celle de la typographie.

Entre littérature et couleur : la peinture

Les relations que les écrits littéraires entretiennent avec la couleur sont de natures diverses. Le lien le plus immédiat passe par le regard qu’un écrivain porte sur un tableau ou un artiste.

Cette relation, essentiellement descriptive quand il s’agit de rendre compte d’une œuvre picturale (lorsque par exemple au 19e siècle le critique d’art doit « faire voir » une toile à laquelle le lecteur n’a pas accès), peut se faire plus personnelle quand l’œuvre d’art génère l’œuvre écrite.

Rendre compte d’un tableau et de l’impression produite, trouver dans une œuvre une source d’inspiration, faire d’un peintre le personnage d’un roman, sont autant de façon pour un écrivain d’entrer dans le monde de la couleur.

Salon de 1846 : De la couleur, dans Œuvres complètes, Charles Baudelaire., euil, 1968
À la Bpi, niveau 3, 840″18″BAUD 1

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Écrits sur l’art, 1867-1905
J.-K. Huysmans, Bartillat, 2006

« Il serait puéril de le nier. Les bas d’azur à jarretière citron, les bas cerises, les bas noirs brodés de ramages blancs, les bas à damier cramoisi et soufre, les bas mauve ou fleur de pêcher, diaphanes et laissant discrètement percer le rose de la peau ou épais et dessinant seulement le contour troublant du mollet, sont aussi bien que les pierres serties, que les gazes-très-claires, que le fard de Chine, le blanc de perle, le bleu myosotis, aussi bien que les pâtes musquées et le khôl d’Orient, les poivres longs, les rouges piments, les sauces incendiaires, habiles à réveiller la torpeur des estomacs lassés. » 

dans : La Nana de Manet, l’Artiste (Bruxelles), 13 mai 1877

À la Bpi, niveau 3, 704.407 HUY

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Deux couleurs existent au monde, le vert est la seconde : voyage en compagnie de Vincent
Serge Atzeni, La passe du vent, 2003
Recueil de poèmes posthumes de Sergio Atzeni sur la quête d’identité d’un peuple à travers l’histoire. Relate son voyage européen à travers la fable et le blues jusqu’à ce qu’il croise le regard de Vincent Van Gogh et en imprègne ses poèmes.

À la Bpi, niveau 3, 850″19″ATZE 2

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Créations dans 
Histoires pour Matisse
A.S. Byatt, Flammarion, 1997
Debbie et Robin se sont rencontrés aux Beaux Arts et se sont mariés. Elle a renoncé à l’art et travaille dans un journal, il est artiste peintre et attend qu’une critique d’art vienne voir ses oeuvres. Il ne supporte pas les tenues bariolées de Mrs Brown, la domestique, et n’hésite pas à la sermonner sur l’harmonie des couleurs, jusqu’au jour où…

À la Bpi, niveau 3, 820″19″BYAT 2

Couleur et imaginaire

Le rapport entre texte et couleur peut être d’une autre nature. Les noms de couleur, les mots de la couleur, dans leur infinie variété et leur poésie sont alors l’élément déclencheur à l’origine de la création littéraire. Ces termes puissamment évocateurs, chargés de résonances universelles mais aussi intimes sont propices à de multiples variations, souvent poétiques, et ce d’autant plus qu’ils entrent en résonance avec l’univers mental d’un auteur.

On peut citer :

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Éléments
Jean Métellus, Janus, 2008
Dédiés aux éléments naturels, air, terre, eau, feu, ces vers sont suivis d’une série de poèmes sur les couleurs, de l’orangé à l’indigo en passant par le blanc ou le violet.

À la Bpi, niveau 3, 848 METE 4 EL

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Couleurs
Remy de Gourmont, Mercure de France, 1915-1925
Chacune des 13 nouvelles du recueil dresse le portrait d’une femme dont le caractère est en relation avec la couleur qui donne le titre à la nouvelle.

Au cours de l’été 2010, Le Monde des livres demandait à plusieurs écrivains d’écrire un texte en s’inspirant d’une couleur. Cette série a été publiée sous le titre « Une couleur, un écrivain » :

  • Bleu : La maison message, d’Emmanuelle Pagano, le 16/07/2010
  • Rose : Le spectre du rose, de A.S. Byatt, le 23/07/2012
  • Noir : Cimetière d’Afrique, de Didier Daeninckx, le 30/07/2010
  • Jaune : Une robe solaire, d’Ananda Devi, le 06/08/2010
  • Rouge : L’aube du sang et des larmes, de Sandro Veronesi, le 13/08/2010

(Ces textes sont consultables dans la base de presse Europresse, à la Bpi, niveau 2  Secteur Presse)

La couleur des mots

Les écrivains ont parfois recours à la couleur dans sa matérialité la plus élémentaire, celle de la typographie.
Pour ceux qui l’ont mise en oeuvre, l’impression colorée apporte une nouvelle dimension au texte ; ce que l’oeil perçoit enrichit et module ce que lit l’esprit.

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L’écriture colorée ou Je vous aime en rouge : sur une dimension nouvelle de l’écriture : la couleur
Albert Memmi, Périple,1986
Par-delà un procédé littéraire d’écritures colorées on aboutit à une classification des langages et à une éthique de l’écrit. Pour Albert Memmi, chaque registre du texte écrit (langage de la vérité, de la fantaisie, analogique..) devrait correspondre à une couleur exprimant le degré de vérité du texte.

À la Bpi, niveau 3, 846.1 MEMM 4 EC

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Ode à la ligne 29 des autobus parisiens
Jacques Roubaud, Attila, 2012
Noir, rouge, bleu, vert, violet, marron… Pour faciliter la lecture, la règle typographique suivante a été adoptée : à chaque profondeur de parenthèses correspond une couleur et un décrochement dans la ligne, orchestrant ainsi une sorte de polyphonie visuelle dans ce texte d’hommage à la ligne 29 des autobus parisiens.

À la Bpi, niveau 3, 840″19″ ROUB 4 OD

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La prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France
Blaise Cendrars ; illustrations Sonia Delaunay, PUF 2011
Dans cette relation imaginaire d’un voyage de Moscou à Kharbin, les peintures de Sonia Delaunay accompagnent le texte de Cendrars, imprimé dans une typographie colorée, pour une lecture que les deux artistes ont voulu simultanée. « Les contrastes simultanés des couleurs et le texte forment des profondeurs et des mouvements qui sont l’inspiration nouvelle », écrivent-ils dans une lettre à André Salmon.

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Compact
Maurice Roche, Tristram, 1997
Dans la réédition de ce roman de Maurice Roche, paru en pour la première fois en 1966, le chromatisme initialement voulu par l’auteur est rétabli, le texte étant composé en sept couleurs. Chaque couleur est attribuée pour la distinguer à l’une des sept voix qui s’entremêlent dans le récit.

Pour des éléments plus techniques sur la typographie en couleur, voir le mémoire de 4e année de Thomas Lexcellent, Penser la typographie en couleurs, Ecole Nationale des Arts Décoratifs.  

Publié le 25/11/2014 - CC BY-SA 3.0 FR

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