Sélection

Construire avec le vivant

Depuis la fin du 19e siècle et le mouvement Art nouveau, le vivant est une source d’inspiration majeure en art et en architecture. À partir de 1990, le biomimétisme a trouvé de nouveaux terrains d’expérimentations avec la convergence des nanotechnologies, des biotechnologies, du numérique et des sciences cognitives. Dès 2004, l’architecte pionnier Marcos Novak annonce : « Nous pourrions finalement en arriver à un stade où l’architecture ne serait pas constituée de matériaux inertes, mais serait quasi-vivante, dont les matériaux quasi-animés seraient cultivés. Aussi étrange que cela puisse paraître, une telle évolution ne ferait que mettre l’architecture en adéquation avec le reste du monde, lequel après tout, n’est pas construit, mais émerge constamment de processus écologiques vivants ». Cette évolution conduit les architectes à travailler non plus seulement en imitant le vivant, mais avec le vivant, par exemple en introduisant des matériaux organiques dans leurs réalisations.

Dans le cadre de l’exposition « La fabrique du vivant » qui se tient au Centre Pompidou jusqu’au 15 avril 2019, Balises propose une sélection de ressources sur le rapport qu’entretient l’architecture avec le vivant à l’époque contemporaine.   

De l’architecture organique et biomorphique à la blobitecture

« L’architecture du futur construira en imitant la nature, parce que c’est la plus rationnelle, la plus durable et la plus économique des méthodes » disait l’architecte catalan Antonio Gaudí au tout début du 20e siècle. Figure majeure de l’Art nouveau, Gaudí puise son inspiration dans les lignes sinueuses de la nature, des arbres, des fleurs, des plantes, des animaux, et tout ce que nous nommons aujourd’hui « le vivant ». L’architecture n’est plus uniquement considérée comme un abri contre les éléments naturels. Au contraire, la nature devient source d’inspiration et d’imitation.
Durant le 20e siècle, l’architecture organique, l’architecture biomorphique et plus récemment la blobitecture se développent en suivant cette idée. Cette dernière, que l’on appelle aussi blob architecture, est liée au développement de l’informatique qui permet la conception de formes jusque-là inédites, comme celles créées par Frank Gehry ou Zaha Hadid.

Construire avec le vivant : un architecte comme « éleveur » ?

Depuis le début du 21e siècle, il ne s’agit plus de constuire comme le vivant, mais de construire avec le vivant. Il ne s’agit plus seulement d’imiter des formes organiques, de répliquer les processus biologiques de morphogénèse et d’évolution du vivant, ou d’utiliser des matériaux biosourcés (comme le bambou, le chanvre, les roseaux, le liège…) mais de produire, véritablement, d’autres formes de vie : des formes de vie alternatives et architecturales, propres à être habitées, plus sensibles, intelligentes, réflexives et même conscientes, avec lesquelles il nous serait possible de dialoguer. Le projet architectural Futur Venice, qui propose de renforcer les fondations de Venise en s’appuyant sur une technologie du vivant, et la mise au point d’un béton auto-régénérant par les universités de Gand et Delft sont deux illustrations de cette nouvelle manière de travailler avec le vivant. Selon Alberto T. Estévez, « l’architecte du futur ne dirigera plus des maçons mais des ingénieurs génétiques ». L’intention de l’architecte n’est plus de définir une unique forme architecturale mais plutôt ses règles d’émergence, lesquelles doivent être assez ouvertes pour produire une évolution intéressante : l’architecte devient ainsi un « éleveur » de créations architecturales.

Casa Batlló d'Antonio Gaudí
Casa Batlló d’Antonio Gaudí, via Pxhere

Publié le 02/04/2019 - CC BY-SA 3.0 FR

Sélection de références

La Fabrique du vivant

Marie-Ange Brayer, Olivier Zeitoun
Éditions du Centre Pompidou et Éditions HYX, 2019

La Fabrique du vivant est le troisième catalogue consacré au code et à la création, dans le cadre des expositions du cycle Mutations / Créations du Centre Pompidou.
« Les biotechnologies sont à présent utilisées comme médium par les artistes, les designers ou les architectes. Si les outils numériques de simulation générative autorisent la recréation du vivant, la question qui se pose aujourd’hui est : comment programmer le vivant ? » L’ouvrage retrace une archéologie du vivant et de la vie artificielle avec les essais de Marie-Ange Brayer, Samuel Bianchini et Emanuele Quinz, Carole Collet, Spyros Papapetros et Olivier Zeitoun. Les œuvres d’une cinquantaine de créateurs — artistes, designers, architectes — ainsi que des projets de laboratoires de recherche questionnent ce nouvel écosystème numérique.

À la Bpi, niveau 3 704-94 FAB

Biomimétisme : science, design & architecture

sous la direction de Manola Antonioli
Loco, 2017

Des chercheurs, des architectes, des philosophes, des designers et des artistes définissent ce qu’est aujourd’hui le biomimétisme. Cet ouvrage aborde les deux tendances de l’architecture biomimétique : celle qui s’inspire du vivant et celle qui fabrique avec le vivant.

À la Bpi, niveau 3, 741-8 BIO

Le Grand Livre du biomimétisme : s'inspirer de la nature pour inventer demain

Veronika Kapsali
Dunod, 2017

Le biomimétisme consiste à s’inspirer de la nature dans le domaine des innovations techniques. Cette monographie retrace son histoire avant d’explorer en quoi cette pratique inspire le design contemporain par ses apports dans la forme, la surface, la structure et la fabrication.

À la Bpi, niveau 3, 741-8 KAP

Hervé Baley et Dominique Zimbacca, architectes : pour une autre modernité

Anne-Laure Sol
Lieux dits, 2018

Dans un contexte de constantes difficultés matérielles, Hervé Baley et Dominique Zimbacca réalisent une vingtaine de maisons et d’immeubles, principalement en Île-de-France, entre 1959 et 2000. Le logement individuel devient pour eux le terrain d’expérimentation d’une conception organique de l’architecture. Leurs diverses réalisations reflètent leur désir d’appliquer les processus naturels à l’architecture, et de tendre vers un idéal d’harmonie entre l’homme et l’espace qu’il habite.

À la Bpi, niveau 3, 724.407 SOL

Les Territoires du vivant : un manifeste biorégionaliste

Mathias Rollot
François Bourin, 2018

Une réflexion sur l’architecture durable et adaptée à l’environnement dans lequel elle s’implante selon le principe de « réhabitation biorégionale ». Une éthique biorégionaliste est développée pour apporter des solutions innovantes en lien avec les éléments, le vivant et les territoires.

Architectures non standard

Frédéric Migayrou
Centre Pompidou, 2003

Ce catalogue d’exposition publié en 2003 est fondamental pour comprendre l’importance du numérique dans la conception architecturale d’aujourd’hui, qui permet de redéfinir les standards de la forme et l’espace, ce que l’on appelle désormais « l’architecture computationnelle ».

À la Bpi, niveau 3, 724-8 ARC

La Matérialité de l'architecture

Antoine Picon
Parenthèses, 2018

« Les avant-gardes numériques s’intéressent à des thèmes comme les liens entre le vivant et les procédures algorithmiques. Ils constituent l’une des directions d’expérimentation comme celle de l’architecte américain Karl Chu qui propose de concevoir à l’avenir les édifices à partir de séquences d’instruction fonctionnant à la façon d’un code génétique. Plus généralement, ces liens sont au cœur des démarches qui se réclament de la notion de material computation. En retrait de ces démarches expérimentales, on ne peut qu’être frappé par l’alliance qui se noue dans de très nombreux cas entre inspiration organique et utilisation d’algorithmes. »

À la Bpi, niveau 3, 72.01 PIC

Vers une cité végétale

Luc Schuiten
Mardaga, 2010

Une utopie créatrice, fondée sur une architecture qui utilise principalement les formes d’organismes vivants comme matériaux de construction. Luc Schuiten poursuit la réflexion entamée dans son ouvrage Archiborescence (2016) sur les questions d’environnement et d’écologie.

À la Bpi, niveau 3, 70″19″ SCHU 1

La Cité du Vin : XTU architects, Anouk Legendre, Nicolas Desmazières

Frédéric Migayrou
HYX, 2017

Ce livre présente la Cité du Vin imaginée par le cabinet d’architectes XTU, Anouk Legendre et Nicolas Desmazières. Cette prouesse architecturale est implantée sur l’ancien site des Forges en bord de Garonne, dans le quartier des Bassins à flot, tout proche des récentes Halles de Bacalan, au nord de Bordeaux.

À la Bpi, niveau 3, 720.9 MIG

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