Libéralisme autoritaire : notre sélection de ressources
La Bpi vous propose une sélection de ressources en lien avec le cycle de conférences consacré au libéralisme autoritaire, jusqu’au 2 mars.

Pensée par le juriste allemand Hermann Heller en plein essor du nazisme, développée par des économistes tels Carl Schmitt ou Friedrich Hayek, la notion de libéralisme autoritaire fait l’objet d’un fort regain d’intérêt en théorie politique depuis une vingtaine d’années. Ce renouveau s’explique notamment par la médiatisation des thèses du journaliste indo-américain Fareed Zakaria au début des années 2000. Ce champ d’étude interdisciplinaire interroge la traditionnelle distinction entre les démocraties libérales et les régimes autoritaires, voire dictatoriaux.
Attentifs aux bouleversements géopolitiques en cours, de nombreux universitaires, journalistes et personnalités politiques s’accordent sur le postulat suivant : loin de s’opposer dans leurs fondements, les démocraties libérales et les régimes autoritaires ne diffèrent qu’en degrés d’exercice du pouvoir. Qu’ils se réclament ou non, ou partiellement des libertés individuelles et économiques, tous ces régimes ont en commun de recourir à des élections permettant aux peuples de choisir leurs dirigeants. La grande majorité sont des États de droit, favorables au marché et inquiets des expressions civiques. Des chercheurs de premier plan comme Jothie Rajah, Eugénie Mérieau ou Grégoire Chamayou notent également que régimes libéraux comme autoritaires révèlent une fracture croissante entre le suffrage exprimé par les peuples et la décision publique. Celle-ci est de plus en plus accaparée par des structures centralisatrices et/ou technocratiques. Cette verticalisation peut générer de la frustration, voire un sentiment de perte de souveraineté.
Ces analyses peuvent sembler contre-intuitives. Elles invitent à questionner un regard européocentré habitué au présupposé des Lumières du XVIIIe siècle. Comme le signale l’ancien ministre et penseur Hubert Védrine, ce présupposé se fonde sur l’idée que le libéralisme, dont la valeur cardinale du Progrès se veut universelle, aboutirait nécessairement à la démocratie. Ce présupposé veut également que les électeurs votent en faveur d’idées présentées comme émancipatrices par un système médiatico-politique, et que les dirigeants gouvernent de manière à ce que le libre échange concoure à la paix des nations. Ce consensus s’est renforcé à la fin de la Seconde Guerre mondiale, devenant dominant lors de l’effondrement de l’URSS en 1991 et du boom de la mondialisation économique. On s’attendait à ce que le libre échange instaure la démocratie libérale à l’échelle du globe : or, il a généré d’autres formes de gouvernance et d’acceptions de la liberté, que ce soit par exemple en Chine, en Thaïlande ou à Singapour.
A l’heure de la massification planétaire des crises sociales, économiques, politiques et environnementales, le champ de recherche comparatif du libéralisme autoritaire permet de mieux comprendre la complexité des modes de gouvernance contemporains, d’en discerner les tenants et les aboutissants, qu’ils nous soient proches ou, en apparence, plus éloignés.
Publié le 07/02/2025 - CC BY-SA 4.0